Mes retrouvailles avec Les Hauts de Hurle-Vent

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Cette citation des Hauts de Hurle-Vent d’Emily Brontë, sur laquelle je suis tombée ce matin, m’a donné envie de revenir sur ce roman hors catégorie, un des plus importants de la littérature anglaise du XIXème siècle. Ayant été très marquée par l’ouvrage dans mon adolescence (je l’ai lu pour la première fois en 5ème), j’ai voulu le relire récemment pour me remémorer pourquoi.

L’histoire : Les Hauts de Hurle-Vent sont des terres balayées par les vents du nord. Une famille y vivait, heureuse, quand un jeune bohémien attira le malheur. Mr. Earnshaw avait adopté et aimé Heathcliff. Mais ses enfants l’ont méprisé. Cachant son amour pour Catherine, la fille de son bienfaiteur, Heathcliff prépare une vengeance diabolique. Il s’approprie la fortune de la famille et réduit les héritiers en esclavage. La malédiction pèsera sur toute la descendance jusqu’au jour où la fille de Catherine aimera à son tour un être misérable et fruste. (Source : 4ème de couverture)

Une chose est sûre : ma relecture m’a montré à quel point j’avais oublié, à quel point le souvenir que j’avais de ce livre était devenu diffus. C’est donc avec bonheur que j’ai retrouvé les landes froides et pluvieuses, battues par le vent. Avec surprise que je me suis replongée dans cette ambiance sombre et violente. Avec délice que j’ai refait connaissance avec cette galerie de personnages sans juste milieu, rudes et âpres ou bien d’une tiédeur frôlant l’insupportable, flirtant tous plus ou moins avec la folie.

Surtout, j’ai revécu avec Catherine et Heathcliff leur passion hors du commun. Hors du commun car l’histoire de ces personnages n’a rien de romanesque, ni même de romantique. Heathcliff, être rustre et cruel, sauvage et vengeur, n’a absolument rien du prince charmant. L’amour de ces deux-là est instinctif, animal, indiscutable, non négociable, tout autant que brutal et sans concession. Lorsque Catherine dit « Je suis Heathcliff », c’est presque malgré elle, parce que le lien qui existe entre eux dépasse tout.

A ce titre, lire Les Hauts de Hurle-Vent confine à une véritable expérience, bien différente des romans plus lisses de l’époque. On a même parfois du mal à se rappeler que l’oeuvre a été écrite par une jeune femme de 28 ans, vivant isolée dans la lande anglaise avec ses soeurs. Difficile en effet d’imaginer qu’une telle cruauté, qu’une telle noirceur et que des personnages aussi torturés aient pu sortir de l’imagination d’une créature à l’apparence si douce. Cette seconde lecture a donc été presque aussi marquante pour moi que la première, peut-être éclairée différemment par mon expérience de femme, sur la nature de la passion notamment. De nouveau, j’ai été séduite par le style d’Emily, moins fluide sans doute que celui de sa soeur Charlotte (dont j’ai également beaucoup aimé le Jane Eyre), mais envoûtant et sans pareille pour dépeindre cette atmosphère gothique, à la limite du fantastique parfois.

Curieusement, après avoir tellement aimé le roman, je n’ai jamais été tentée d’en regarder les adaptations cinématographiques, trop romanesques, comme la vieille version de William Wyler ou la plus récente de Peter Kosminsky, ou à l’inverse trop minimalistes, comme la dernière adaptation en date d’Andrea Arnold, dont le peu que j’ai vu m’a fortement déplu. En ce qui concerne Les Hauts de Hurle-Vent, et c’est sans doute le seul roman dont je pourrais dire cela, je préfère rester sur mon propre film intérieur : sombre, intense, désespéré.

‘Le Treizième Conte’ de Diane Setterfield

Ces dernières années, j’ai tenté de retrouver dans la littérature anglo-saxonne contemporaine le bonheur que j’ai ressenti en découvrant les romans britanniques du XIXème siècle. En naviguant dans les propositions personnalisées d’Amazon, j’ai trouvé quelques pépites, dont Le Treizième Conte de Diane Setterfield, paru en 2006.

J’ai été particulièrement marquée dans ma jeunesse par la lecture des romans des soeurs Brontë : ‘Jane Eyre’ de Charlotte, et surtout ‘Les Hauts de Hurlevent’ d’Emily. J’ai aimé ces personnages passionnés et tourmentés au romantisme échevelé, les landes battues par la pluie et le vent, les ciels bas et sombres de l’Angleterre, l’ambiance gothique parfois à la limite du fantastique. J’ai aimé aussi ce côté suranné et les conventions de l’époque, qui ont fait émerger des personnages de femmes fortes et rebelles.

Pour qui apprécie cette littérature anglaise, Le Treizième Conte en recrée l’atmosphère à tel point qu’il pourrait être d’époque.

13emeconteVida Winter est l’un des auteurs les plus connus de Grande-Bretagne et vit retirée du monde. Cependant, personne n’a jamais réussi à écrire sa biographie, Vida livrant à chaque fois une version différente et totalement fantasque de sa vie. Pourtant, voyant approcher la fin de son existence, elle choisit pour une raison inconnue de se confier à Margaret Lea, une jeune libraire passionnée de littérature britannique du XIXème siècle, et lui intime de venir s’installer chez elle pour lui conter sa véritable histoire et lui livrer ses secrets.

Mais la jeune fille n’entend pas se laisser manipuler par la vieille dame. Alors entre fausses pistes, faux-semblants et mensonges, personnages torturés parfois aux portes de la folie et secrets de famille, la véritable histoire, complexe et fascinante, se dessine, jusqu’à l’incroyable dénouement. Avec au coeur de l’intrigue un ouvrage de Vida, Les Treize contes de la métamorphose et du désespoir, dont le père de Margaret possède l’unique version et qui n’en contient… que douze. Petit à petit, au fil des révélations à demi-mot, chacune des deux femmes fera face à ses propres fantômes et à sa propre histoire.

Les lieux, sombres manoirs, landes humides et jardins étranges, sont aussi présents que les personnages de la famille Angelfield et sont lourds des événements et des nombreux fantômes du passé. La peinture de ces tableaux presque surnaturels nous hante encore après la lecture, comme avant eux le manoir de Thornfield dans ‘Jane Eyre’ ou encore le Manderley de ‘Rebecca’ de Daphné du Maurier.

J’ai été littéralement envoûtée par la magie du Treizième Conte, par cette histoire dans l’histoire : un premier roman dense, captivant, très bien écrit et… so british, que je vous souhaite d’aimer autant que moi.