Les Outrepasseurs – tome 1 : Les Héritiers

Les outrepasseurs tome 1 - Cindy Van WilderLire le livre d’une personne qu’on connaît (virtuellement ou dans la « vraie » vie) a toujours un petit côté excitant. C’est donc dans cet état d’esprit que j’ai abordé le premier tome de la trilogie Les Outrepasseurs : Les Héritiers, puisque j’ai connu la Cindy van Wilder blogueuse avant la Cindy écrivaine.

Les Outrepasseurs, c’est l’histoire de Peter, un jeune garçon comme les autres, du moins jusqu’au jour où il découvre que sa vie n’est pas tout à fait celle qu’il croyait. Echappant de peu à une attaque où il manque d’être tué, il est emmené par sa mère dans une demeure, la Lion House, où il est censé obtenir des réponses. Il y fait la connaissance d’un être étrange et impressionnant, Noble, et apprend avec stupéfaction que lui-même et d’autres jeunes gens font partie d’une lignée dont il ne soupçonnait même pas l’existence. Il va également découvrir un monde sombre et effrayant où se tapissent des êtres maléfiques et peu recommandables, les Fés, très éloignés des gentils petits êtres ailés dépeints dans l’imaginaire populaire.

Cela faisait longtemps que je ne m’étais pas attelée à un roman fantastique axé jeunesse, mes dernières lectures du genre remontant aux sagas Harry Potter qu’on ne présente plus, et A la Croisée des Mondes de Philip Pullman.

Première bonne surprise : l’écriture. Je suis un peu une maniaque en la matière et un style agréable contribue toujours de façon non négligeable à mon plaisir de lecture, de même qu’un style approximatif peut m’agacer au plus haut point et me gâcher une bonne histoire. J’ai donc beaucoup apprécié le style de Cindy, à la fois fluide, précis et dynamique. De plus, Cindy affirme son positionnement Young Adult, en livrant des passages sombres, d’autres parfois osés, propres à séduire un public plus mature.

Deuxième bonne surprise : les différentes époques de l’histoire. L’histoire se découpe en effet en deux lignes de récit parallèles, une première se déroulant à notre époque, dans le monde de Peter, et une seconde au Moyen Age. Et là, je salue au passage le travail de Cindy sur le vocabulaire et les mots soigneusement choisis, rendant chaque époque du récit crédible et vivante. Cette structure, le passé éclairant le présent, n’est pas sans rappeler Les Larmes Rouges que j’ai lu récemment. Mais là où Georgia Caldera tombait dans l’écueil de la répétition et des longueurs, Cindy a eu la bonne idée de déséquilibrer les deux parties, faisant la part belle à l’action passée, afin de ne pas en casser le rythme. L’action et le suspense montent donc crescendo, même lors des retours au présent jusqu’à…

… la troisième bonne surprise : à la fin du tome, qui est en fait le volume d’exposition de la trilogie,  je n’avais qu’une envie, connaître la suite. Pari gagné donc.

Alors oui, le nombre de personnages m’a parfois un peu perdue et j’aurais peut-être aussi aimé que les caractères soient un peu plus approfondis. Il faut dire que sept familles sont concernées, sur deux générations (pour le moment). Cela fait beaucoup de monde et en outre, les prénoms se retrouvent d’une époque à l’autre. Ceci dit, si je n’avais pas lu la version Kindle (une première pour moi qui suis pourtant très attachée au papier), j’aurais peut-être vu avant d’arriver à la fin que Cindy avait fait un petit récapitulatif bienvenu des arbres généalogiques dans les dernières pages et j’aurais également mieux profité de la très belle couverture dont bénéficie l’ouvrage.

Quoi qu’il en soit, le deuxième tome, La Reine des Neiges, est à paraître en septembre 2014, et j’en serai certainement. To be continued…

Atelier d’écriture chez Olivia : Entrevue près du lac

unehistoireCette semaine, le moins qu’on puisse dire c’est je suis totalement hors délai pour l’atelier d’écriture chez Olivia ! Mais tant pis, j’ai joué quand même en mettant à profit mes trois heures de train de Marseille à Paris.

Voici donc les mots qu’il fallait placer : éclairage – clarté – lampadaire – attente – rendez-vous – quand – bientôt – demain – jour – nuit – aube – début. Contrainte facultative : soit vous prenez tous les mots, soit vous n’en sélectionnez que cinq et vous ajoutez la consigne suivante : le lieu de l’action doit être au bord d’un lac.

‘-Cynthia, vos parents sont là. Vous allez prendre vos médicaments avant d’aller les voir. Devant moi. Je ne veux pas que ça se passe comme il y a quinze jours, vous vous souvenez ? Vous avez fait peur aux autres patients et vous avez mordu une infirmière. Si une telle chose se reproduit, je serai forcé de vous interdire les sorties dans le parc.

Cynthia s’exécuta sans opposer de résistance. Pourtant Dieu sait qu’elle abhorrait la léthargie dans laquelle la plongeaient ses comprimés, cette absence totale de sentiments, comme si chacune de ses terminaisons nerveuses était étouffée dans du coton. Ce traitement lui faisait perdre la notion du temps et elle avait l’impression d’évoluer dans un univers sans relief, sans couleur, sans goût. Finalement, elle préférait mille fois cette douleur fulgurante qui la frappait parfois sans prévenir à ce désert… et à l’absence de Jensen. Deux semaines plus tôt, la crise qu’évoquait le Docteur avait été telle qu’un cri primal et sauvage, qu’elle n’avait pu retenir, s’était échappé d’elle et lui avait fait perdre complètement le contrôle. Elle revit le visage épouvanté de sa mère, entendit les cris d’effroi autour d’elle, jusqu’à ce que les infirmières la maîtrisent et lui administrent une dose qui l’avait terrassée en quelques secondes et dont l’effet lui avait semblé durer une vie entière.

-Venez, je vous emmène dans le parc. Vos parents vous attendent au bord du lac. Je compte sur vous pour que tout se passe bien. Nous nous verrons ensuite pour notre rendez-vous hebdomadaire.

Cynthia jeta un œil rapide par la fenêtre et aperçut ses parents au loin. La clarté de cette fin d’après-midi lui semblait étrange, cotonneuse, presque triste, si différente des lumières naissantes de l’aube, porteuse des espoirs du jour, qu’elle contemplait chaque matin. A moins que ce ne soit l’effet des médicaments et l’éclairage gris et terne qu’ils apportaient à son quotidien, le début de la léthargie tant redoutée qui la précipitait dans sa nuit intérieure. Puis le Docteur la prit par le bras pour l’accompagner dehors.

-Bonjour ma chérie, comment vas-tu aujourd’hui ? lui demanda sa mère en la serrant contre elle.

Cynthia avait du mal à supporter les efforts visibles que sa mère faisait pour paraître badine, et les larmes qui menaçaient à tout moment de jaillir de ses yeux. Les premiers temps de son arrivée, elle ne l’avait pas reconnue. Tous ses souvenirs étaient comme un amas informe qu’elle n’arrivait plus à déchiffrer. Les noms et les visages s’entrechoquaient dans sa tête sans parvenir à se montrer distinctement à sa conscience. Petit à petit, le puzzle s’assemblait de nouveau, des bribes de son histoire refaisant surface de manière lente et erratique. Elle n’aurait même pas su dire depuis combien de temps elle était là, ni pourquoi. Elle avait d’abord reconnu sa sœur Maya, sa mère, puis son père. Lire la souffrance, puis la pitié, sur ces visages aimés lui avait causé un choc, d’autant plus qu’elle n’arrivait pas à se souvenir de ce qui les avait causés. Malgré ses suppliques, Maman refusait d’en parler. Elle disait que le Docteur Moisan voulait qu’elle se souvienne toute seule, que c’était important. Ce qui provoquait sa colère, du moins quand les médicaments ne l’avalaient pas avant qu’elle n’ait eu une chance de se manifester.

-Maman, quand vais-je pouvoir sortir d’ici ? Demain ? Dans dix ans ? hurlait-elle.
-Bientôt ma chérie, disait inlassablement Maman. Le Docteur dit que tu fais beaucoup de progrès, que ta mémoire revient. Il ne faut pas aller trop vite, il ne faut rien forcer si tu ne peux pas encore te souvenir…

Mais aujourd’hui, Cynthia se sentait plus résignée que d’habitude.

-Ca va, Maman, répondit-elle d’une voix morne.

Puis elle se tut. Elle contempla le lac et écouta la voix de Maman qui se faisait lointaine. Comme à chacune de ses visites, cette dernière lui parla de personnes dont le souvenir lui revenait parfois, lui dit qu’elle manquait à tout le monde et qu’elle avait hâte d’organiser la grande fête de son retour à la maison. Papa quant à lui resta silencieux. Il était dérouté par la nouvelle Cynthia et ne reconnaissait plus sa fille dans ce petit être recroquevillé et fragile au comportement imprévisible. Il l’aimait toujours, bien sûr, mais il n’arrivait pas à trouver les mots justes, aussi il se contentait d’être présent. Malgré son mutisme, son attitude était en fin de compte beaucoup plus supportable pour Cynthia que celle de Maman, et les échanges silencieux qu’elle avait avec lui lui apportaient au fond plus de réconfort. Au bout d’un certain temps, le soleil se mit à baisser à l’horizon. Les éclairages et les lampadaires du parc n’allaient pas tarder à s’allumer. Elle interrompit alors le bavardage de Maman.

-Je suis fatiguée Maman, et je commence à avoir froid. Je voudrais rentrer.

Le Docteur Moisan arriva à ce moment-là avec une infirmière.

-Madame et Monsieur Lavoie, je vais devoir vous enlever votre fille, c’est l’heure. Cynthia, Sylvie va vous raccompagner dans votre chambre, j’ai un mot à dire à vos parents, je vous rejoins dans quelques minutes pour notre entretien.

Elle dit au revoir à ses parents, détourna rapidement le regard pour ne pas voir les larmes imminentes dans les yeux de Maman et suivit docilement l’infirmière.’

Holidays

A mon grand regret, mes passages sur la blogosphère se font plus rares en ce moment (les journées sont décidément trop courtes !), mais là je fais une pause : une petite semaine de vacances parisiennes avec mes fripouilles. En attendant de prendre le train tout à l’heure, je me replonge dans mon petit Polnareff appliqué 🙂

Bon week-end de Pâques (ou vacances) à tous !

I’m Breathless

En 1990, Madonna campait la chanteuse de cabaret Breathless Mahoney dans Dick Tracy. Au visionnage de cette vidéo issue du film, le lien de parenté avec ma Honey Malone d’hier m’a sauté aux yeux (même si l’homme dans la salle est trèèèèèèès loin de mon Jensen 😀 ) ^^ Bon début de week-end à tous 🙂

Atelier d’écriture de la semaine : Rébellion

jensen ackles untouchables 4

La semaine a été intense et j’ai eu peu de temps pour venir poster et surtout lire vos billets, je m’en excuse. Hier, les mots de la collecte chez Asphodèle ne m’ont pas, mais alors pas du tout inspirée, alors pour la peine, j’ai opté pour la rébellion et l’atelier perso. Bon ok, dans ce cas ce n’est pas vraiment un atelier, juste l’accouchement d’une histoire qui m’a obsédée toute la journée d’hier.

Voilà donc mon bébé du jour 🙂

‘Il était encore là ce soir. Honey l’avait repéré dès qu’elle était entrée sur scène. Il passait quasiment toutes ses soirées au Red Bunny. Un manteau gris anthracite sur un costume noir, un feutre masquant à moitié son visage. Face à son whisky, les yeux perdus dans le vide, il ne parlait jamais à personne. Honey se plaisait à croire qu’il venait pour l’écouter chanter, il lui semblait même avoir croisé son regard il y a quelques jours. Il était beau et son air sombre ajoutait à l’aura de mystère qui l’entourait. Les yeux verts, le nez fin, les lèvres gourmandes, de celles qui attirent les baisers brûlants.

Elle s’était tout imaginé à son propos : était-il un détective privé en filature ? Un agent secret ? Un homme d’affaires débordé ? Elle s’était vue des centaines de fois rentrer avec lui un soir et passer une nuit d’amour silencieuse et passionnée, où seuls leurs souffles auraient battu la mesure de leurs ébats.

jensen ackles untouchablesCe soir, sans doute possible, il la regardait. Pour lui, elle se montrait plus sensuelle que jamais, le grain de sa voix se faisait velours et semblait vouloir l’envelopper de sa caresse. Tout à l’heure, après son show elle irait lui parler. Elle se donnerait une contenance en fumant ses menthols au porte-cigarettes. Elle le vamperait pour le faire tomber dans ses filets. Il semblait inaccessible mais tous les hommes succombaient au charme vénéneux de Honey Malone, alors pourquoi pas lui ? Et ce soir il la regardait. Et c’est pour lui qu’elle chantait.

Après le dernier morceau, elle glissa un mot de remerciement à l’oreille des musiciens et jeta de façon ostensible un regard appuyé à Luke, le bassiste qui en pinçait pour elle. Puis elle attrapa son porte-cigarettes, descendit de la scène et se dirigea vers lui avec une démarche chaloupée et provocante. Honey était en chasse, le désir à l’affût. Il ne l’avait pas quittée des yeux.

-Bonsoir, vous auriez du feu ? lui demanda-t-elle d’une voix suave.

Sans lui répondre, il sortit son briquet et alluma sa cigarette.

-Un whisky on the rocks pour la demoiselle, lança-t-il à l’adresse du barman.

Il connaissait déjà ses goûts. Honey savait qu’elle avait gagné, la conquête avait presque été trop facile.

-Et qui Honey doit-elle remercier ?
-Jensen.
-Jensen… ? demanda-t-elle en suspendant son nom dans les airs.
-Juste Jensen.

-Cynthia ?

Elle tourna lentement la tête. Une blouse blanche, voilà qui tranchait de façon désagréable avec le costume noir sexy. Elle ne répondit pas et resta de marbre, debout près de la fenêtre de sa chambre immaculée.

-Cynthia, vous avez encore caché vos comprimés sous votre oreiller hier, ce n’est pas bien. Vous savez ce qui se passe quand vous ne prenez pas vos médicaments. Je vais être dans l’obligation d’être plus ferme avec vous si vous ne coopérez pas.

Oui, elle savait ce qui passait quand elle ne prenait pas ses médicaments. Elle tourna de nouveau la tête et aperçut Jensen. Il remettait son feutre et son manteau et s’apprêtait à quitter le Red Bunny. Il lui fit un signe de la tête et s’éloigna. Elle le regarda sortir du bar alors que la voix lascive de Lana Del Rey entonnait encore ‘I love you Honey… I’m ready I’m ready to go…’. Elle était presque en prison mais elle avait droit à la musique, grâce à laquelle elle se créait sa propre liberté. Un sourire naquit sur ses lèvres, car elle savait qu’il reviendrait.’

L’atelier d’écriture chez Olivia : Ariane se révèle

unehistoireVoici le résultat de la récolte des mots chez Olivia cette semaine : sagesse – proverbe – absolument – subtil – vieillesse – ennemie – adversaire – jeu – échecs – fiasco – erreur – accepter – joie – plaisir – offrir.

Le passage ci-dessous était déjà écrit, j’y ai donc inséré les mots, à ma manière comme chaque semaine. Désolée par avance car il est un peu long. Donc previously on Ariane’s story : Millie vient de retrouver Ariane, son amie de lycée, à la fac, et découvre qu’elle y mène des études de théâtre. Elle se souvient alors que six ans plus tôt, la pièce Cyrano de Bergerac s’était montée dans leur classe de seconde. Son professeur de français avait insisté pour qu’elle passe l’audition pour le rôle de Roxane et Ariane l’avait aidée à répéter. Then…

‘Je ne dormis presque pas de la nuit. Roxane. C’était presque trop beau pour être vrai. Le lendemain matin, je me levai comme un polichinelle de mon lit pour aller au lycée. Le trois heures de devoir surveillé de français, sur le thème de la sagesse dans les proverbes, me parurent une éternité. En sortant à 11h30, Ariane me demanda :
– Ca va, pas trop stressée pour tout à l’heure ?
– Si, je suis à deux doigts de m’évanouir ! On déjeune ensemble ce midi ?
– Oui, avec plaisir, viens à la maison. Ma mère n’est pas là et il doit y avoir des restes de lasagnes dans le frigo.

L’appartement de la mère d’Ariane était à cinq minutes à pied. C’était un vieil immeuble sans ascenseur et elles habitaient au premier. Nous entrâmes et Ariane se dirigea vers la cuisine pour aller réchauffer le repas. Pendant que nous déjeunions, elle m’offrit un panaché, puis lâcha d’un air embarrassé :
– Il faut que je te dise quelque chose, Millie. Après ta répétition d’hier, j’ai décidé de passer aussi l’audition. C’est quand même le rôle de Roxane, tu vois… Mais avant de le faire, je voulais être sûre que ça ne te dérange pas.

La surprise m’ôta les mots de la bouche et je repensai à sa performance subtile et étonnante de la veille.
– Eh bien… euh non… ça ne me dérange pas… absolument pas, balbutiai-je. Après tout, c’est le jeu, l’audition est ouverte à tout le monde. Et si on loupe Roxane, on pourra toujours essayer de choper le rôle de la vieille duègne ou d’une bonne sœur, m’efforçai-je de dire d’un ton détaché qui se voulait joyeux.

Lorsque vint l’heure de retourner au lycée, j’étais encore plus stressée. Non seulement j’allais auditionner pour le rôle de ma vie, mais en plus ma meilleure amie serait mon adversaire, devrais-je dire mon ennemie ? Je n’aimais pas vraiment la tournure que prenaient les choses. Nous arrivâmes dans la salle de l’Aumônerie à 14h pile. M. Loupiot était déjà arrivé et de nombreux élèves de toutes les classes de seconde étaient déjà présents. Il attendit encore quelques minutes et annonça :
– Vous savez que le rôle de Cyrano est déjà attribué à Sylvain Cadier, puisqu’il est le seul à s’être présenté. C’est vrai qu’assumer un rôle de mille quatre cents vers n’est pas donné à tout le monde ! Nous allons donc auditionner pour tous les autres rôles aujourd’hui. A commencer par les rôles féminins, puisqu’il y en a très peu dans la pièce, nous choisirons ensuite tous les rôles masculins, et nous finirons par celui de Roxane.

Je m’écroulai intérieurement. Puisque tous les rôles allaient être attribués avant celui de Roxane, je compris que si je ne l’obtenais pas, je n’aurais aucun rôle dans la pièce. Les auditions durèrent des heures, et même si Ariane me glissait une bonne blague de temps en temps au creux de l’oreille, je me décomposai de minute en minute. Quand vint enfin notre tour – nous étions quatre à briguer le rôle – j’étais en état de tout sauf d’auditionner.
– Mais, puisqu’il est cruel, vous fûtes sot de ne pas, cet amour, l’étouffer au berceau !

J’entendis ma voix, trop aiguë, trop tremblante et je sus, alors même que je récitai encore les vers, que c’était fichu. Un vrai fiasco. Quand je revins à ma place, Ariane me chuchota à l’oreille « Millie, tu es la meilleure ». Les deux autres candidates passèrent à leur tour mais je n’entendais plus rien. Puis vint le tour d’Ariane. Comme la veille, elle se transfigura et récita les vers avec une fluidité et un talent que je ne lui connaissais pas et qui fit taire toute la salle. A la fin de la tirade, M. Loupiot, soufflé comme nous tous par sa prestation inattendue, reprit la parole :
– Nous avons désormais tous nos personnages et je dois maintenant faire un choix pour Roxane. Mesdemoiselles, merci beaucoup pour votre présence et votre courage. Mais pour la pièce, après ce que je viens de voir et d’entendre, je vais attribuer le rôle de Roxane à Ariane. Merci encore à vous tous. A tous ceux qui font désormais partie de la pièce, je vous donne rendez-vous mercredi prochain à 14h pour le planning et l’organisation.

Nous sortîmes tous lentement de la salle. Je ne savais pas trop comment réagir, je me devais d’être heureuse pour Ariane mais en réalité j’étais effondrée par mon échec. Me présenter à cette audition avait été une véritable erreur. Je tentai de la féliciter en gardant un semblant de contenance, puis j’inventai une excuse incompréhensible pour rentrer le plus vite possible à la maison. Je pris le bus et en arrivant chez moi, l’appartement était vide. Mes parents ne rentreraient pas avant au moins une heure, ce qui me laissait une heure entière pour pleurer tout mon saoûl.

Pendant les semaines qui suivirent, Ariane et moi fîmes comme si de rien n’était, continuant à rire de tout et à nous repaître de livres et d’histoires. Simplement, nous évitions soigneusement d’évoquer le sujet de la pièce. Seuls les mercredis après-midis, que nous passions jadis ensemble, et qu’Ariane passait désormais à répéter, étaient la preuve que quelque chose avait changé entre nous. M. Loupiot m’avait demandé si je n’avais pas été trop déçue et s’était excusé de son choix. Je lui avais répondu nonchalamment qu’Ariane était à l’évidence la meilleure et que le rôle aurait sans doute été trop difficile pour moi de toute façon. Et j’avais pleuré dans les toilettes en sortant.’

The Walking Dead : rendez-vous en octobre…

the walking dead cast

La série-phénomène The Walking Dead vient de terminer sa quatrième saison ce week-end sur un final paroxystique, nous laissant sur un suspense insoutenable jusqu’au mois d’octobre. Retour donc sur une série que j’avais entamée une première fois il y a un an environ. A cette époque, pourtant friande d’histoires post-apocalyptiques (zombiesques ou pas), j’avais rapidement laissé tomber parce que j’avais trouvé le début un peu mou et sans véritable rythme.

Il faut croire qu’un épisode et demi ne suffisait pas pour que la sauce prenne. Sur les conseils de Walkers convaincus, j’ai donc repris la série du début, bien concentrée. Résultat des courses : j’ai enchaîné quatre saisons (voire même six, si on considère qu’ayant recruté Chéri en route, j’ai vu deux fois les deux premières) et je suis désormais complètement mordue (ah ah !). Il ne faut pas le dire mais ces dernières semaines, j’étais bien plus impatiente de retrouver Rick Grimes et sa bande que les frères Winchesters de Supernatural. Shame on me !

The Walking Dead, adaptation d’un comic

walking dead bdPour ceux qui ne la connaissent pas, The Walking Dead est inspirée de la BD éponyme et se déroule dans un monde envahi d’humains transformés en zombies suite à une épidémie d’origine inconnue. Après plusieurs mois de coma, le shérif adjoint Rick Grimes se réveille et découvre avec stupéfaction (et horreur) ce nouveau monde de cauchemar. En tentant de retrouver sa femme et son fils, il croise la route d’autres survivants et ce sont leurs efforts pour survivre que l’on suit au fil des saisons.

Passer du format film au format série sur ce sujet était audacieux, parce qu’on pouvait croire que les zombies avaient déjà tout dit au cinéma. Même si la série n’invente rien (j’ai vu récemment ‘La nuit des morts vivants‘ de George Romero et je me suis rendu compte que tout était déjà là), le pari est malgré tout plus que réussi. Visuellement déjà, en particulier dans la première saison, la série n’a rien à envier à ses collègues des salles obscures : les visions de routes abandonnées, ou encore celles de la ville d’Atlanta envahie de zombies, sont saisissantes. De plus, l’ambiance est angoissante à souhait, et les zombies font vraiment bonne figure (pour des zombies, j’entends). Enfin, le format série trouve tout son sens dans le développement d’intrigues plus poussées et l’approfondissement du caractère des personnages.

Des personnages terriblement malmenés, complexes pour certains, et régulièrement mis face à des choix cornéliens. Au-delà du phénomène zombie en lui-même, qui n’est au fond que la trame de base, les questions soulevées par la série sont passionnantes : dans un monde post-apocalyptique où la menace est permanente et où la survie prime, où se place la frontière entre le bien et le mal ? Comment garder son humanité ? Ne finit-on pas par oublier qui on est (comme le demande Carl Grimes à son père : ‘Who are we ?’) ? Et nous, que ferions-nous ? Et qui serions-nous ?

Des personnages complexes tout en contradiction

Rick Daryl The Walking Dead

Rick et Daryl

Le shérif Rick Grimes, personnage autour duquel est centré la série, est à lui seul l’incarnation de toutes ces interrogations. Représentant de l’ordre et des règles dans l’ancien monde, il se retrouve meneur d’un groupe de survivants dans un nouveau monde qui n’en a plus. Il navigue ainsi entre sa propre morale et des choix inacceptables mais pourtant ‘à faire’.

Ainsi, Rick n’est pas le leader auquel on s’attend, ce n’est pas un héros. Il a des faiblesses, il fait des choix en apparence bons, mais aux conséquences parfois désastreuses. Il sombre quand la douleur est trop forte, il est même transparent, voire absent, à certains moments de la série. Mais à force de choix impossibles, de pertes de proches, d’alternance de calme apparent et de chaos, un Rick sauvage, déterminé et véritablement surprenant surgit en cette fin de saison 4. Un Rick qui n’a plus rien à voir avec le boy scout de la saison 1. Et c’est tant mieux, car cela augure le meilleur pour la prochaine saison. Le Terminus n’a qu’à bien se tenir.

Hormis Rick, qui est – vous l’aurez deviné – mon personnage préféré, la série regorge de personnages tout aussi intéressants : Daryl, l’archer mutique avec son arbalète et sa Harley, qui se révèle de plus en plus attachant et profond au fil des saisons, alors même que le personnage n’existe pas dans la BD. Carol, la femme brimée par son mari qui s’avère être beaucoup plus complexe, ambiguë et forte qu’elle-même ne l’aurait cru. Michonne, la guerrière au sabre, sombre et pourtant si humaine. Glenn et Maggie, le petit couple glamour, mais néanmoins musclé et efficace, de la série. Pour les principaux.

Des intrigues au cordeau malgré un rythme parfois très lent et une écriture approximative

Walking-Dead-Daryl-and-Beth

Beth et Daryl

The Walking Dead n’est pas une série palpitante à proprement parler. Le rythme est plutôt lent, les intrigues très centrées sur les personnages (auquel il est peu conseillé de s’attacher trop car les morts sont légion) et assez peu sur l’action. Mais qu’on ne s’y trompe pas : ce rythme lent et faussement nonchalant est surtout prétexte à la mise en exergue de scènes puissantes et émotionnelles, comme la scène de la grange à la moitié de la deuxième saison, ou de scènes fulgurantes (et stressantes) d’attaques de zombies, où l’on tremble en se demandant qui sera le prochain.

En termes d’écriture, même si la série est très addictive et diablement efficace, on est loin de la précision d’un Breaking Bad par exemple, où quasiment aucun détail n’était laissé au hasard. Régulièrement, certaines scènes ‘WTF’ m’ont à plusieurs reprises fait lever les yeux au ciel. La succession de showrunners différents sur les quatre saisons n’y est certainement pas pour rien. Pourtant ça fonctionne, parce que la série, qui est probablement la meilleure du genre en ce moment, sait toujours se montrer audacieuse et pertinente au moment où il le faut pour faire replonger le spectateur.

Après une première moitié de saison 4 aux allures de pétard mouillé, faisant suite à une saison 3 très musclée, plus violente que les précédentes mais moins profonde, les scénaristes ont su retrouver dans la seconde moitié ce qui faisait l’attrait initial de la série : la peur viscérale, les impératifs de la survie, les questions existentielles, ainsi que des scènes intimistes réussies et émouvantes (entre Beth et Daryl ou Carol et Tyreese), pour enfin terminer sur trois épisodes (surtout les 14 et 16) très culottés, presque choquants, qui m’ont rappelé pourquoi j’aime cette série (et les histoires de zombies).